Le
quartier Saint-Laurent se situe sur le Publémont, l'une
des collines ouest de la
ville de Liège. Il tire son nom d'une abbaye bénédictine
fondée au tout
début du XIème siècle.
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Les
origines :
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À
la fin du Xème siècle, c'est l'évêque
Éracle qui dirige le diocèse de Liège.
Il se rappelle que c'est la Meuse, cent ans plus tôt,
qui a amené les envahisseurs normands. C'est la Meuse
encore dont les crues, régulièrement, inondent
les îlots de la cité. Les hauteurs du « publicus
mons » (la « montagne publique »),
colline occidentale de la ville, lui paraissent un site « abrupt
et rassurant ». C'est là qu'il envisage
d'installer son palais épiscopal et une cathédrale
consacrée à saint Lambert, l'évêque
martyr à l'origine de la fondation de Liège.
Vue
de Liège en 1567. On remarquera l'altitude démesurée
donnée à la colline du Publémont. |
Ce
projet n'aboutira pas. L'église dont Éracle initie
la construction sur le Publémont, en 965, ne deviendra pas
la cathédrale de Liège, mais la basilique Saint-Martin.
Le
Mont Saint-Martin (vue datant de 1903). C'est l'artère
principale qui mène du centre-ville au Publémont.
Au-delà de la basilique Saint-Martin, commence le
quartier Saint-Laurent
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Le mausolée d'Éracle dans le chœur de la
basilique Saint-Martin.
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L'évêque
Éracle entame aussi, sur le Publémont, la construction
d'une église dédiée à saint Laurent
(en 968 selon la tradition locale), mais l'édifice n'est
pas terminé du temps de son vivant.
D'origine
espagnole, saint Laurent devient, à Rome, le premier diacre
du pape Sixte II. La légende veut qu’il ait été
martyrisé le 10 août 258, sur un gril de fer chauffé
par des chardons ardents. C'est pourquoi on le célèbre
le 10 août.
L’enluminure ci-contre, représentant le martyre,
est extraite de l’ouvrage «Speculum humanae
salvationis», de Jean de Stavelot, moine de l’abbaye
de Saint-Laurent au XVème siècle
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Voici
une autre représentation du martyre de saint Laurent
( Jacobus de Voragine, Legenda Aurea, Paris, XVème
siècle).
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Éracle
est un évêque nommé par l'empereur germanique
Otton I, et le
fait qu'il choisisse le patronyme « Saint-Laurent »
est significatif. Il fait ainsi allusion à la victoire de
son protecteur sur les Hongrois le 10 août 955. Un brin de
cour au souverain à qui il doit sa carrière.
Le
successeur d'Éracle est Notger, qui reçoit d'Otton
II de tels pouvoirs
temporels que son diocèse devient, en 980, la principauté
épiscopale de Liège.
Notger
entreprend une politique de grands travaux, mais contrairement à
son prédécesseur, c'est dans la vallée, à
l'emplacement de l'actuelle place Saint-Lambert, qu'il veut faire
battre le coeur de la cité. Il y fait construire un palais,
une cathédrale, et fortifie la ville en l'entourant d'un
rempart.
La
muraille érigée par Notger fait perdre de l’intérêt
au Publémont, où seule la basilique Saint-Martin est
incluse dans le périmètre protégé.
Quant
à l'église Saint-Laurent commencée sous Éracle,
des textes en refont mention au début du XIème siècle.
C'est le prince-évêque Réginard (1025-1037),
semble-t-il, qui ordonne l'achèvement de l'édifice
en lui adjoignant les bâtiments nécessaires à
l'installation d'une communauté monastique.
L'abbaye
de Saint-Laurent :
Une
abbaye, au Moyen-Age, joue un rôle intellectuel et artistique
très important. Les moines sont des maîtres réputés
qui enseignent la philosophie et la théologie. Ils relatent
des vies de saints, rédigent la chronique de leur région,
transcrivent patiemment les connaissances de leur époque.
Ils s’adonnent à la musique, à la poésie,
pratiquent l’orfèvrerie, la peinture, la sculpture...
L’abbaye de Saint-Laurent va marquer l’histoire liégeoise
pendant près de huit siècles, jusqu’à
ce que les révolutions liégeroise et française,
à la fin du XVIIIème siècle, mettent un terme
à sa carrière religieuse et la transforment en hôpital
militaire.
L'abbaye de Saint-Laurent à
la fin du XVIIIème siècle (gravure de Remacle
Le Loup)
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Cliquez
ici
pour en savoir davantage sur ces prestigieux bâtiments. |
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A la fin des années 1990, les
lieux ont été entièrement rénovés;
ils n'abritent plus un hôpital militaire, mais divers
services administratifs ou logistiques de l'armée,
dont l'État-Major provincial, le 3 CRI (3ème
Centre Régional de l'Infracture) et le BLT (transports). |
Le
quartier militaire vu de l'Institut Saint-Laurent :
La
rue Saint-Laurent au tout début
du XXème siècle. |
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En
juillet 2006 (une grille remplace les bâtiments détruits
par un V1 en 1944). |
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L'emplacement
du carrefour Saint-Laurent en 1735. |
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Le
carrefour en 1958. |
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La
place Saint-Laurent en 2006
Cette
petite place au sommet de la rue Wazon était
autrefois appelée le
« Trixhay » (autre graphie du wallon
« trihê », qui désignait
un terrain banal ou jouaient les enfants). Cet
endroit appartenait à l'abbaye de Saint-Laurent,
mais les moines en avaient accordé la banalité,
c'est-à-dire l'accès public.
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Aux
XVII et XVIIIème siècles, une fête foraine
de plusieurs jours se tient au Trixhay, début août,
à l'occasion de la fête de saint Laurent. Quelques
tentes et baraquements y sont installés pour vendre
de la bière, de la nourriture, des friandises...
Ces implantations supposent bien sûr le paiement d'un
droit au receveur de l'abbaye.
Lors de ces jours de liesse, le jeu qui connaît un
grand succès est celui qui consiste à
« djèter à l'awe » (« jeter
à l'oie »). Un gros pieu supporte une roue
de charrette à laquelle sont accrochées quelques
oies vivantes. Le joueur est armé d'un bâton
de bois ou d'une barre métallique, qu'il lance pour
atteindre les volatiles, dans le but cruel de les tuer.
Les
renseignements concernant le « jeter à
l'oie » proviennent d'un article écrit
à la fin des années 1960 par Monsieur
Jean Pieyns, alors stagiaire aux Archives de l'État
à Liège; les deux documents ci-dessous
font partie des collections du Musée de la
Vie Wallonne. |
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La
basilique Saint-Martin :
Si
l'institut Saint-Laurent s'aperçoit de certaines
rues du centre-ville, c'est surtout la basilique Saint-Martin
qui domine la cité des hauteurs du Publémont :
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La basilique vue du quartier Sainte-Marguerite, situé
en contrebas du Publémont. Là où l'on
distingue les arbres, c'est le quartier Saint-Laurent, qu'on
appelait autrefois
« faubourg » Saint-Laurent parce que situé
en dehors de l'enceinte fortifiée :
Vue
aérienne de la basilique (GlobalView
2006) :
Quand
l'évêque Éracle, en 965, décide
de faire construire cet édifice, c'est dans l'idée
d'en faire sa nouvelle cathédrale, dédiée
à la Vierge et saint Lambert. Mais Notger, son successeur,
dédie le sanctuaire à saint Martin, lui conférant
le statut de collégiale.
C'est
à Saint-Martin, en 1246, qu'est instituée
la Fête-Dieu (ou fête de l'Eucharistie) dans
le diocèse de Liège, à la sollicitation
de sainte Julienne, prieure de l'hospice-léproserie
de Cornillon.
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Cortège commémoratif,
dans le quartier Saint-Laurent, à l'occasion
en 1946 du 700ème anniversaire de la Fête-Dieu.
On
reconnaît, à gauche, l'hospice Sainte-Agathe,
situé juste en face de l'Institut Saint-Laurent.
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En
1946, la commémoration se poursuit par un
cortège fluvial sur la Meuse.
Les
différentes embarcations proposent des décors
rappelant l'histoire de Liège et de Saint-Martin.
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Cette
photo représente la péniche décorée
par l'Institut Saint-Laurent. À bord, des reconstitutions
du clocher de la cathédrale Saint-Paul, de
la basilique Saint-Martin, de grues et cheminées
d'usines symbolisant les activités industrielles
de la région liégeoise. |
Un
autre épisode historique célèbre
marque l'histoire du bâtiment en 1312. Il
est connu sous le nom de « Mal Saint-Martin ».
« Mal » comme « malheur ».
Cette
année-là, dans la nuit du 3 au 4 août,
des nobles en armes investissent le centre de la
cité pour rétablir l'autorité
des « Grands », hostiles aux
libertés démocratiques obtenues par
les « Petits » (principalement
les corporations de métiers). Le peuple réussit
à repousser ses adversaires sur les hauteurs
du Publémont :
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« Là,
harcelés par les Liégeois, attaqués
par les houilleurs d'Ans et de Montegnée, par
les paysans des alentours, armés les uns de
leur pic, les autres de leur faux, les assaillants
débordés cherchent refuge dans l'église
Saint-Martin. Derrière les lourdes portes et
les épaisses murailles, ils espèrent
échapper à la fureur populaire. Renonçant
à un siège dans les règles, le
peuple amasse des matières inflammables, et
bientôt le monument |
entier n'est plus qu'un immense brasier »
(Yves Bricteux, Histoire de la Principauté
de Liège, Ed. Desoer Lg). |
Deux
cents aristocrates périssent ainsi dans les flammes.
L'édifice
est restauré, mais en 1468, il est saccagé
par les troupes de Charles le Téméraire.
C'en
est fini de l'église romane primitive.
De 1506 à 1542, sous le règne du prince-évêque
Érard de La Marck, ont lieu les travaux de reconstruction
qui aboutissent au bâtiment gothique actuel.
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Vue de la collégiale Saint-Martin vers 1735
(Remacle Le Loup).
C'est
en 1886 que l'église accède au rang
de basilique. |
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Au
début du XXIème siècle, la basilique
vient de subir d'importants travaux de rénovation.
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La
basilique Saint-Martin en 2005, vue depuis une classe de
l'institut Saint-Laurent tout proche (à l'arrière-plan,
l'hôpital de la Citadelle, sur la colline Sainte-Walburge) :
L'institut
Saint-Laurent et l'hôpital militaire photographiés
depuis le clocher de la basilique en 1978 :
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Dans
les siècles passés, quand la ville était
entourée de remparts, diverses portes fortifiées
contrôlaient l'accès à la cité.
La gravure ci-dessous à gauche représente la
porte Saint-Martin en 1735. La photo correspondante montre
le même endroit de nos jours :
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L'Institut
Saint-Laurent :
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L'institut technique et professionnel
Saint-Lauren, se situe tout près de la basilique
Saint-Martin. J'y ai enseigné de 1968 à
2012 (ma toute première année d'enseignement
s'est déroulée en 1967-68 à l'institut
Saint-Laurent de Herstal). |
Voici
ce que l'on aperçoit de l'école quand on passe
rue Saint-Laurent :
L'entrée
du parking. |
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La
façade rénovée en 1983. |
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Visitez
la rubrique «Mon
école» pour davantage de renseignements sur
cet établissement scolaire. |
En
face de l'intitut Saint-Laurent, se trouve l'ancien hospice
Sainte-Agathe
Ce sont des chanoinesses du Saint-Sépulcre qui fondent
ce couvent en 1634, avec l'aide du prince-évêque
Ferdinand de Bavière.
En
1847, le complexe devient un hospice pour aliénées
mentales, confié aux Sœurs Hospitalières
de Saint-Charles-Borromée.
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Les bâtiments vus de l'arrière.
Longtemps
abandonné, le lieu a fait l'objet, en ce début
du XXIème siècle, d'importantes travaux
de restauration. N'est-il pas question d'y installer
un complexe hôtelier haut de gamme, bien que
depuis fin 2005, la rénovation semble être
interrompue? |
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